07 octobre 2025

35 - Eclats et monotonie de la prison

Tandis que je croupis dans un coin de ma cellule, au-dessus de ma tête le plafond de mon univers étriqué apparaît comme un immense espace de platitudes. Un décor froid et morne où rien d'autre ne se passe que le vol en cercles immuables de mes idées noires.
 
Mais aussi, parfois, il devient le minuscule théâtre où se joue la comédie de mes rêves les plus lumineux. Mais ces moments de pure légèreté restent rare...
 
Les murs qui m'encerclent semblent des montagnes indépassables qui me barrent définitivement la route. Ils forment une barrière vertigineuse entre le gouffre et la vie, une frontière radicale séparant les rats pris au piège des hommes libres.
 
D'autres fois ils se transforment en quatre écrans brillants sur lesquels je projette mes étoiles intérieures. Cependant ces petits miracles demeurent exceptionnels...
 
Le sol sur lequel je tourne en rond, parcourant chaque jour des kilomètres en faisant du sur-place, véritable promontoire désenchanté de mon existence dénuée de verdure et de relief, se referme autour de moi tel un îlot où je suis condamné à gésir.
 
Il m'arrive toutefois, lorsque je me trouve de belle humeur, de décoller de cette base mortelle afin de rejoindre des hauteurs imaginaires autrement plus vivifiantes où je puis mieux laisser respirer mon âme... Même si ces ascensions oniriques sont peu fréquentes...
 
Les barreaux qui m'interdisent toute fuite ressemblent à d'indéracinables crocs de cerbères aussi immobiles qu'impassibles, fixés dans le béton pour des siècles.
 
Cela dit, je les mets volontiers en scène, de temps à autre, au service de mes fantaisies : des deux mains je m'y agrippe farouchement et, à l'image d'une drôle de gargouille, parle doucement aux papillons passant à proximité...

Je m'invente ainsi, au fil de ma réalité sans histoire et vide de couleurs, des heures glorieuses et des faits mémorables dont j'ignore encore s'ils valent la peine que je les relate ici ou bien s'ils méritent finalement d'être voués à l'insignifiance.

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