Elles ont des longueurs minutées, des langueurs calculées et de funestes lenteurs.
Avec leurs ailes de plomb, leurs pieds de pachydermes et leurs airs pétrifiés, la ronde monotone des heures autour des quatre murs de ma geôle prend des allures mortelles.
Chacune de ces images du vide ressemble à une vieille sorcière âgée de mille années.
Elles passent, repassent, reculent, reviennent, stagnent, s'éternisent...
Et ma vie file entre leurs doigts de sable. Ou bien se fige sous leurs regards de pierre.
Elles prennent le visage terne des jours mauvais pleins de pesanteurs. Douze fois entre le lever du Soleil et le crépuscule, elles m'assassinent à flamme douce, ne me laissant en paix que la nuit, lorsque je dors.
Je déteste m'attarder en leur compagnie. Ce sont mes pires ennemies en réalité. Et je pleure quand elles sont désespérément creuses. Et me désole tout autant parce qu'aucune d'entre elles ne semble dérisoire.
Au contraire, toutes s'imposent à moi, bêtes et inutiles. Aussi cruciales les unes que les autres par les tourments qu'elles m'apportent...
Cette douzaine de tristes numéros incarne la lourdeur de la mort carcérale, celle qui dure, dure, dure...
Cette exécution sur le long terme, c’est le temps.
Chronos, ce roi des siècles, s’amuse à me faire bouillir d’ennui.
D'abord ils se tient couché dans l'ombre, juste devant l'aube, inerte. Puis se réveille brutalement. Il va et vient à petites enjambées durant tout matin, ralentissant progressivement avant que midi ne se pointe. Là, il fait une pause. Et repart ensuite sur des bases plus solides.
Mais s'arrête net au beau milieu de la journée.
Il y demeure sans compter, s'y installe comme un tyran, s'y étend à loisir et s'y dilate à n'en plus finir... Pour mieux fuir à pas feutré vers la fin de l'après-midi... Quand le soir est enfin arrivé, il trépigne sur place avec insistance et fracas tant que je ne suis pas endormi. Et retourne finalement à sa position initiale d'inertie où il attendra la naissance d'un nouveau lendemain, identique en tous points au précédent...
Et ceci indéfiniment, dans une course folle et absurde vers un but éternellement statique.
Heureusement, j'utilise une partie de ces plombes perdues à mon profit.
Du fond de ma cellule, je tue parfois ces tortionnaires.
Simplement en ne pensant plus du tout à elles.
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