Je demeure seul dans ma triste cellule mais en réalité je n'aimerais
nullement vivre en compagnie d'un codétenu. Je refuse de me coltiner la présence
permanente d'un reflet de moi-même à gueule de déterré, c'est-à-dire de condamné
à vie...
Que chaque hôte de cette prison crève dans son coin, point final !
N'est-elle d'ailleurs pas conçue pour que les fautifs s'y fassent oublier,
chacun de son côté et sans faire d'histoire ? Je ne vais commencer à devenir
socialiste sous prétexte que je me retrouve à croupir au fond d'un trou !
Oui, la solitude est un châtiment mérité mais je la vois également comme un
promontoire prestigieux vers une forme de réclusion plus monacale que carcérale.
Elle est une chance de donner un sens vertical à mon existence de pénitent au
sein de cette structure pénitentiaire.
Je n'ai aucune envie de partager mon pain de prisonnier avec un assoiffé
d'amitié qui viendrait m'étouffer de ses mots de trop, m'ennuyer de ses
silences, m'embarrasser de ses pensées vides. Je ne souhaite pas croiser mon
ombre avec le spectre d'un reclus à perpétuité qui me ressemblerait. Je ne suis
pas fait pour mourir jour après jour sous le regard d'un témoin assidu.
Je préfère me concentrer sur moi-même et faire de mon cheminement entre ces
quatre murs un fructueux envol plutôt qu'un stérile enracinement dans la vacuité
d'une pure relation de barreaux. J'ai besoin de m'alléger, non non de
m'alourdir. Je n'ai pas de temps à perdre à échanger avec des spécialistes du
bavardage en mal de communication. Je vise des hauteurs de prix, non à cultiver
les petitesses de ma condition de taulard.
Qu'on me laisse en paix avec mes flammes intérieures ! Je n'ai rien à
offrir aux autres emmurés de mon espèce !
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