27 septembre 2025

19 - Solitude de fer

Je demeure seul dans ma triste cellule mais en réalité je n'aimerais nullement vivre en compagnie d'un codétenu. Je refuse de me coltiner la présence permanente d'un reflet de moi-même à gueule de déterré, c'est-à-dire de condamné à vie...
 
Que chaque hôte de cette prison crève dans son coin, point final ! N'est-elle d'ailleurs pas conçue pour que les fautifs s'y fassent oublier, chacun de son côté et sans faire d'histoire ? Je ne vais commencer à devenir socialiste sous prétexte que je me retrouve à croupir au fond d'un trou !
 
Oui, la solitude est un châtiment mérité mais je la vois également comme un promontoire prestigieux vers une forme de réclusion plus monacale que carcérale. Elle est une chance de donner un sens vertical à mon existence de pénitent au sein de cette structure pénitentiaire.
 
Je n'ai aucune envie de partager mon pain de prisonnier avec un assoiffé d'amitié qui viendrait m'étouffer de ses mots de trop, m'ennuyer de ses silences, m'embarrasser de ses pensées vides. Je ne souhaite pas croiser mon ombre avec le spectre d'un reclus à perpétuité qui me ressemblerait. Je ne suis pas fait pour mourir jour après jour sous le regard d'un témoin assidu.
 
Je préfère me concentrer sur moi-même et faire de mon cheminement entre ces quatre murs un fructueux envol plutôt qu'un stérile enracinement dans la vacuité d'une pure relation de barreaux. J'ai besoin de m'alléger, non non de m'alourdir. Je n'ai pas de temps à perdre à échanger avec des spécialistes du bavardage en mal de communication. Je vise des hauteurs de prix, non à cultiver les petitesses de ma condition de taulard.

Qu'on me laisse en paix avec mes flammes intérieures ! Je n'ai rien à offrir aux autres emmurés de mon espèce !

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